Les fétiches du Dahomey (2017)
L’EXPOSITION
Il se passe peu de mois sans l’arrivée de nouveaux objets Vodou au musée. Le couple Arbogast, les collectionneurs, souhaitent dès cet été, sortir plusieurs pièces exceptionnelles afin de les faire découvrir aux visiteurs, notamment durant cette période estivale de grande affluence.
L’exposition temporaire « Les fétiches du Dahomey » sera donc installée au rez-de-chaussée du château d’eau ainsi qu’au dernier étage pour quelques mois.
LE MOT DU COLLECTIONNEUR
En tant que collectionneurs et en particulier pour cette exposition temporaire, nous souhaitons avant tout mettre en avant la valeur artistique de ces objets de culte.
Jacques KERCHACHE, promoteur du Musée Branly, estimait que c’est lorsque ces objets se séparent de leur dimension rituelle et religieuse qu’ils deviennent des chefs d’œuvre. Il avait milité pour que les arts premiers soient reconnus au même titre que les autres arts.
Son manifeste de 1990 « pour que les chefs d’œuvres du monde entier naissent libres et égaux » exprime bien l’approche que nous avons de ces objets.
Marc Arbogast
Les catégories d'objets présentés lors de cette exposition
Les bocio sont des fétiches de vie, dénommés aussi fétiches en sommeil. Objets de cultes, symboles et forces de vie, ils fascinent et impressionnent. Plantées dans le sol pour détourner le malheur ou la maladie, ces statues élancées sont placées à l’extérieur des maisons, d’un quartier, d’un village et jouent un rôle de sentinelle, protègent la communauté, un lignage, une société secrète, une famille ou un individu. La majorité de ces bocio est originaire de la région d’Abomey.
Il n’en reste pratiquement plus au Bénin, car ils ont en grande partie été emportés par des marchands d’arts africains. Ils sont aujourd’hui remplacés par de petits piquets de bois. Ces sculptures, souvent minimalistes, d’aspect très contemporain, sont en général délavées et érodées par les éléments car exposés au temps.
Certains qui se trouvaient à l’intérieur des couvents peuvent encore être chargés de croutes sacrificielles (sang, farine de maïs, huile de palme, etc…)
Il faudra pour ces fétiches apprécier la valeur artistique, souvent figurative, tout en y découvrant la créativité et l’imaginaire fécond du féticheur.
Être féticheur est un métier, différent de celui de sorcier. Il nécessite une connaissance des matériaux magiques mais également des talents de sculpteur et d’artiste.
Les visiteurs pourront découvrir plusieurs barques, crocodiles et autres animaux aquatiques sculptés dans le bois où s’incorporent cordons, cordelettes, calebasses, cloches métalliques et matières sacrificielles. Ces divinités de la région lacustre du Sud-Ouest du Bénin dénotent du lien fort tissé entre les populations et leur environnement. Les fétiches aquatiques proviennent de la région du lac Ahémé (on pouvait en trouver jusque vers Aklakou) et les barques mortuaires de la région de Grand Popo.
Ces costumes sont portés par les maîtres initiés du culte Oro en tête des cortèges des Egungun (grand masques) lors de certaines sorties de la forêt sacrée. Ils sont chargés de capter les forces maléfiques, pour protéger l’ensemble des initiés lors des cérémonies.
Les personnes qui n’obéissent pas à leurs ordres sont condamnées à mort.
Ces tenues Egungun des Oro sont extrêmement rares. Nous n’en connaissons pas d’autres que ceux collectées ici. Les Oro ne sortent que la nuit et sont très puissants.
Ces objets sont chargés de nombreux éléments, chacun représentant un lien avec le monde de l’invisible.
Les fétiches présentés sont sans exception, des fétiches provenant d’autels de bokono. Ceux-ci aussi ont été créés en y ajoutant de nombreuses pièces, chacune ayant un sens particulier. Des nœuds, calebasses, cauris, etc.. s’ajoutent à la force des fétiches.
Ils sont tous chargés de croutes sacrificielles restées sur le fétiche, car abrités dans les autels.
On perd ainsi une partie de la beauté de la sculpture d’origine, mais on y gagne tout le volet « magique ».